jeudi 26 janvier 2023

L'Autre - poème de jeunesse







Recueil - Noctifer, Le porteur de nuit

 



CCCXII. 

L’Union spirituelle

Nous nous retrouverons, baignés par l’air bleuté
D’un océan spirituel de volupté.
Et nous nous étreindrons ardemment d’âme à âme
Pareils à deux papillons autour d’une flamme,
Songeant aux amours brisées de nos corps de chair.
Nos désirs éthérés, semblables à l’éclair,
Nageront l’un vers l’autre, esprits purs et glorieux,
Portés par la passion qui pourfend les cieux !
Alors, librement, l’Androgyne originel,
Tout de lumière éblouissante auréolé,
Fleur d’un Nirvana d’azur sombre et velouté,
Embrassera les feux de son rêve éternel.

Joël Gissy


Extrait du recueil : Noctifer, Le porteur de nuit

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samedi 21 janvier 2023

Le continent perdu ou l'archipel guanche


                                 Praia Formosa 

V. (Extrait de "Noctifer, Le porteur de nuit")


Je crois aux dieux féconds des mers originelles

Régnant sur les palais de cités éternelles

Et vois au fond des flots de vastes sanctuaires

Dentelés de coraux, des rivages qui plongent


Parmi les blancs récifs et les tertres qui songent

Dans l’immensité bleue de gouffres somptuaires

En un monde abyssal plus ténébreux et vague

Qu’une fosse océane. Et maint flasque géant

 

Dans ce visqueux éther ondule fainéant,

Sombre et tentaculaire, or que son ventre élague

Des jardins suspendus comme des cathédrales,

Tandis que dans la nuit scintillent les yeux pâles


Des calamars craintifs. Mais l’austère musique

De ce chaos immonde a d’étranges merveilles

Dont chaque bulle blonde éclot dans les oreilles

De quelque vieux démon, physeter fantastique


Qui gronde certain soir. Et ce chant de sirène

En mon esprit résonne et charme mes pensées,

Comme si quelquefois des profondeurs glacées

Montait l’appel d’une Vénus anadyomène.


°°°


L’Ecorce sanglante


De la Terre œil ailé, du python enlacé,

L’œuf mûrit de sa fermentation condensé.

Animées de l’esprit, des chairs en gestation,

Tel un phœnix renaît la génération.

Sous la meule, se refond le Monde broyé.

Au pied de l’arbre ardent du serpent crucifié,

Des Noces l’invité boit le sang du dragon.


°°°


La Fée des Bananiers


Dans sa jupe épaissie de vapeurs végétales,

Sous le bonnet pointu des femmes de son île,

Elle coupait la canne en un geste gracile,

Essuyant sa sueur. De paroles banales,

La volupté de l’instant était si facile.

Et le tout ressemblait à ces danses tribales

Dont la candeur engourdit de langueurs fatales.


°°°


La Praya Formosa


Par une galerie dont la fenêtre donne

Sur une grotte marine où l’océan tonne

De galets noirs grondant aux assauts de l’écume,

Se découvre un golfe à travers la chaude brume.

Sous la silhouette noircie du cap Girão,

Des rocs sombres où résonne un lointain écho,

Eclate une végétation luxuriante.

Au loin, luit des casas la blancheur souriante.


°°°


Sentiment de retour


Anéantissement d’Atlantes au solstice,

Les Faunes, Serpents, tragédie de Ténériffe.

Monade hiéroglyphique d’Achihuran !

Du triangle se renversant, déesse matrice,

Emerge de l’océan l’exact apocryphe.

Sentiment de retour, à Madère, au chaman.


°°°


Epiphanies aurorales


Contrées aiguës d’éclairs vibrant dans l’œil du front,

Du crâne en acouphènes raclant jusqu’au fond

Comme une spire en suite de Fibonnaci.

L’iris s’éveille, à travers sa corne ébloui.

Azur de cités s’imprégnant en la prunelle,

Berceau des mers coulant par cette fontanelle.


°°°


Les Vestiges échoués


Marotte de Cocagne de la Madérienne,

Secouée tel un Mat de contrées englouties,

Surgit soudain le mat d’une arche atlantéenne.

L’archipel pangéographe en laves taries

Pointe encor jusqu’aux îles peuplées d’otaries.


°°°


La Vieille de la Mer


D’Ægypans sacrés au bord des sylves d’Egée

Qu’en des lueurs argentées, nues sur l’onde lisse,

Célébraient en secret des vierges, complice,

Tricotant comme une araignée, la femme âgée,

Un peu tannée par un vieux soleil, se souvient.

«C’était (elle déraille !) avant, bien loin avant…


Qu’outre allant par le sud Ménélas vînt du Nord.

Serpent de mer s’en va dans l’écume et revient.

Veux-je dire, en premier, transportés par le vent,

Plus long que mes blancs cheveux d’un subtil accord. »

-Quant aux fiancées de la nuit, fleurs de magies ?

Chantant aux brumes bleues d’étranges élégies,


A la pleine lune, en une crique atlantique

Que parfume un bosquet d’eucalyptus, tragique,

On les voit encor, irisant leur peau diaphane,

Comme aux griffes des vieillards de Piola, Suzanne.-

Puis, l’enfant se tait, pythie à faire pitié.

Raisonnablement fou qui la croit à moitié.


°°°

                                          

Les Druides de l’Océan


Du mastaba explose, assemblable symbole,

Le disque, et tourne en spirale à sa parabole.

Azur flambant des yeux bridés de momie guanche,

Douce épouse apeurée à la tendre chair blanche !

Archipel aux chiens, des survivants du Déluge,

Eclate l’esprit des Anciens en leur refuge,

Delta inversé de pyramide à sa tranche.

Des monts volcaniques, surgis de l’Enéide,

Démons nageant dans les enfers bleus de l’Echeyde ;

Du ballon solaire heurt, tel frappé de la hanche.


°°°


Le Temple de Tokapok


La géométrie dort des anciens paradoxes.

Architecture en spirale où les équinoxes

Equilibrés croisent les axes d’un solstice,

Comme un colimaçon en spire où la matrice

Ajuste en d’une croix de Saint André les angles

Aux proportions oubliées d’un drapeau des Angles

Qui flotte à Ténériffe. En plane pyramide,

Plane un cadran celtique sous une eau placide.

Momie dravidienne en galette farineuse,

Chant de conque vibrant sur la mer nébuleuse,

Répandant le sang à flots sur l’Autel des Crânes

Pour un démon fertile irriguant les bananes,

Océan bleuté de planctons phosphorescents

Tels autant d’îlots nés de geysers jaillissants.


   Joël Gissy


Les recueils : joelgissypoesie.blogspot.com


                                                                      Guanche

jeudi 19 janvier 2023

La Trompe - poème

 




La Trompe

Quand le mage sylvestre, en sa corne d’auroch
Vrombit en infrabasse un chant immémorial,
Qui s’épand au feuillage et vibre par le roc,
Craquent les rhizomes du frêne primordial.
Le noisetier, d’écureuils, frissonne en l’azur.
Le sanglier lui sourit de son œil obscur,
Le chevreuil le contemple. Et même les abeilles
S’amassent, parfumées, embrassant ses oreilles.
Et les grives lui parlent d’antiques légendes
Dont les corbeaux familiers portent les offrandes.
Viennent à lui les musaraignes et les lièvres.
Les papillons de nuit se posent sur ses lèvres.

Joël Gissy



lundi 16 janvier 2023

Hendécasyllabes dantesques

Poème inédit : 


Hendécasyllabes dantesques 

Des profondeurs de la mer et des forêts 
Du Gabon se révèlent d'anciens secrets. 
Un serpent océanique au troisième œil 
D'une grotte ignorée se tient sur le seuil
Devenant un triton chevauchant l'écueil. 
La sirène Ipeti vit dans la Dola, 
Douleur d'éternité qui la consola. 
D'une autre dimension revient Cousteau, 
A la main serrée au célèbre couteau. 
Le cyclope flamboie de son orbe rouge 
Ainsi qu'un périsprit frappé de sa gouge. 

 Joël Gissy


Lecture improvisée sur Youtube : https://www.youtube.com/shorts/cbv-M08Vc1Y


                              Image de Sergei Tokmakov


mercredi 11 janvier 2023

Deux haïkus


Haïku sur l'hiver

氷がきらめく
水晶の枝
ミッドナイトブルー

La glace scintille
Les branches sont de cristal
Bleu nuit





Un autre haïku, de nouvel an (attention âmes sensibles...)

忘年会
てのひらに
目がある心
骨を吸う


Bōnenkai : fête de fin d'année, "Fête pour oublier"

 L'esprit avec les yeux 
Dans les mains 
Suce les os 

Joël Gissy


On retrouve cette créature légendaire dans le film Le Labyrinthe de Pan. Mais avec les subtilités du japonais, j'ai donné un double sens moins sombre à ce poème ambivalent comme le changement d'année.