jeudi 6 avril 2023

Songe en miniature


Songe en miniature


1.

Tu t'étais transformée, petite fée

A la chevelure toute emmêlée

Comme les fils de racines terreuses.

Tu m'as accueilli dans tes souches creuses.

J'aimais tant cette petite demeure,

Terrier où se réjouissait ta famille,

Les poches remplies de gros champignons

Dont les gonflaient d'odeurs les chapeaux ronds,

Dans les bosquets rêvés aux fleurs mouvantes

Semblant parfois des grenades béantes.

Ah ! me noyer sans fin dans tes yeux noirs

Luisant ainsi que de petits miroirs,

Tandis que nous nous effleurions la main.

Mais, à présent, bien loin, mon âme pleure.

Sont parties, étranges, les voix chantantes.

Quand j'ai parlé à ce jeune lutin

Fumant sa pipe avec un air malin,

Soudain, s'est fanée la petite fête,

Dans la seconde où j'ai tourné la tête. 


2.

La Mère obscure


La Dormeuse anormale,

Au fin visage pâle,

Souvent, passait ses nuits,

Tous l'avaient raconté,

Penchée sur le bébé

Avec ses yeux rougis

Dans ses longs cheveux noirs,

A tousser. Tous les soirs,

On la voyait sortir

De sous son arbre creux,

Dans un soupir affreux ;

À l'ombre de son pas,

"Car ils ne viendront pas !",

Un vieux de m'avertir,

Et j'entends murmurer

Ses filles : me méfier

De ces buveurs de sang,

De la maudite enfant.


Joël Gissy 

 



 

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